À peine sorti d’une participation remarquée dans La Calisto au Festival d’Aix-en-Provence cet été, le contre-ténor Théo Imart revient sur son parcours et dévoile ses projets à venir. Au programme : le baroque, naturellement, des débuts attendus à l’Opéra de Paris et l’enregistrement d’un disque avec l’Opéra de Versailles.
« (…) Comment avez-vous développé votre technique vocale ?
J’avais certaines facilités, mais il manquait un legato, une homogénéité, de la rapidité dans les coloratures… et surtout une base solide. Ma voix semblait fragile : je me fatiguais vite, je devais constamment faire attention à ne pas la solliciter en dehors des répétitions. Elle s’est construite au fil des années, en même temps que je mûrissais dans cette tessiture. Mireille Alcantara m’a énormément aidé, en me faisant travailler comme une mezzo-soprano, c’est-à-dire en voix de tête. J’ai ainsi abordé un répertoire très large : l’opéra baroque bien sûr, mais aussi des mélodies de Bellini, des mélodies françaises, des Lieder, de l’opéra romantique ou des opérettes. Ce travail éclectique a façonné ma projection, mon timbre et ma souplesse. Je pense que si je m’étais limité à la musique baroque, ma voix ne se serait pas développée de la même manière. Mireille Alcantara avait une oreille redoutable : elle savait détecter le manque d’harmoniques graves ou aiguës pour enrichir le son. Une autre étape importante pour moi a été la rencontre avec la metteuse en scène Mireille Laroche, qui m’a aidé à me libérer scéniquement. Enfant, j’avais un peu honte de chanter de la musique classique à Marseille, et cette réserve se ressentait. Mireille Laroche m’a appris à creuser le texte, à comprendre pourquoi on dit chaque phrase, ce qui change complètement l’interprétation… et aide aussi techniquement.
(…) Cet été, vous avez participé à La Calisto et fait vos débuts au Festival d’Aix ?
Oui, cela a été un moment important. En 2022, j’avais participé à l’Académie du Festival d’Aix, ce qui m’avait ouvert des portes. J’étais ravi qu’on me propose le rôle de Satyre dans l’opéra de Cavalli, qui convenait parfaitement à ma voix. La production a été exceptionnelle, avec une vraie cohésion entre chanteurs, un chef à l’écoute, des décors magnifiques, le Théâtre de l’Archevêché avec son ciel étoilé rendant le tout magique. Les retours ont été très positifs, France Musique et Harmonia Mundi ont enregistré la production. C’était une expérience très forte, et j’ai eu un peu de nostalgie quand tout ceci a été fini.
Vous collaborez régulièrement avec l’Orchestre de l’Opéra Royal du Château de Versailles, des projets sont-ils prévus avec eux ?
Oui absolument. L’an dernier il y a eu une grande tournée en Asie sur 25 jours, avec un rythme intense : presque cinq concerts par semaine, parfois quatre soirs de suite dans des villes différentes, des déplacements incessants, un vrai marathon ! Les lieux et l’accueil étaient incroyables, surtout dans des villes où peu d’orchestres internationaux passent habituellement. La dernière étape était à Oulan-Bator, en Mongolie, suivie par un voyage épuisant vers Hanoï pour deux concerts le même jour. Je retourne en Chine en octobre, invité par le Suzhou Orchestra, j’attends ce moment avec impatience.
J’ai par ailleurs d’autres projets avec l’orchestre à la rentrée : un concert au Salon d’Hercule et un CD de cantates profanes de Vivaldi. Avec Laurent Brunner, nous avions le projet de regrouper dans un même album des cantates avec continuo et avec orchestre, ce qui est rare. Par ailleurs, je chanterai le rôle de Polinesso dans Ariodante de Haendel. J’étais un peu hésitant car la tessiture est plutôt grave, alors que je suis plutôt mezzo ou soprano, mais le rôle est fascinant. Mais j’ai déjà chanté des parties plus graves, comme cet été dans La Calisto, et cela sonnait très bien. Je suis plus flexible aujourd’hui, je lâche un peu prise sur ma voix. De plus, Versailles a une acoustique extraordinaire, ma voix s’y projette très bien.
Vous ferez également vos débuts en 2026 à l’Opéra national de Paris ?
Oui, je vais participer à une grande production baroque inédite, avec la création scénique de l’Ercole amante d’Antonia Bembo à l’Opéra Bastille, sous la direction de Leonardo García Alarcón. Je chanterai le rôle du Page, avec deux airs et un duo dans le style de Cavalli. (…) ».
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